Réflexions sur les notions d'imputabilité scientifique et de causalité juridique

Malentendu ou vraie différence ?

Équipe

  • direction : Laurent Bloch, Patrick Brochard, Fleur Delva
  • Williams Ahitte, Emmanuelle Burgaud, Cécile Castaing, Ludovic Chaut, Ian Kirillin, Sylvain Niquège, Christophe Radé, Aude Rouyère, Adamou Sidi Moumouni

Projet

  • Étude sur la causalité et l'imputabilité dans les maladies liées à l'environnement, autour d'une confrontation des différentes approches des disciplines en cause :
    • Outre les conséquences d'ordre médical, social et économique, l'épidémie de coronavirus apparue en fin d'année 2019 a engendré une certaine défiance à l'égard des milieux experts et médicaux, notamment à propos des éventuels effets secondaires des vaccins. Par ricochet, cette suspicion contre la parole scientifique a fait ressurgir la question de la relation entre le juge et le sapiteur, c'est-à-dire le degré de dépendance du premier envers le second ainsi que le poids de l'expertise dans la décision judiciaire. Les logiques des experts et des juristes diffèrent au point de pouvoir aboutir à des conclusions en apparence discordantes.
    • Causalité et imputabilité juridiques. - La distinction entre causalité et imputabilité revêt une importance cruciale dans le domaine juridique, où la précision des concepts est essentielle. Ces deux termes, bien que souvent utilisés de manière interchangeable, englobent des nuances distinctes susceptibles d'influencer le raisonnement juridique.
      En droit, la causalité, d'une part, se réfère à la relation de cause à effet entre un acte ou un événement et ses conséquences. En d'autres termes, elle examine si un acte a directement provoqué un résultat particulier. La causalité ne se préoccupe pas nécessairement de la question de la culpabilité, mais plutôt de l'enchaînement logique des événements. Ainsi, établir la causalité implique de démontrer que l'acte reproché a été un élément déclencheur direct des dommages ou des conséquences.
      D'autre part, l'imputabilité concerne la question de savoir si une personne peut être tenue responsable légalement de ses actes. Elle va au-delà de la simple relation causale en examinant la question de la culpabilité et de la capacité de l'individu à répondre de ses actions devant la loi. L'imputabilité prend en compte des facteurs tels que l'intention, la connaissance et la capacité mentale de l'auteur supposé de l'acte répréhensible. En droit civil, l'imputabilité pose la question de la liberté de faire (imputabilité physique) ou la liberté de vouloir (imputabilité morale). Privé de l'imputabilité physique (contrainte, force majeure), le présumé responsable ne pourra se voir imputer une responsabilité. À l'inverse, l'imputabilité morale est désormais indifférente en droit civil alors qu'elle reste déterminante en droit pénal.
      En droit, la causalité se concentre sur la relation de cause à effet, tandis que l'imputabilité évalue la responsabilité juridique de l'individu. Comprendre cette distinction est cruciale, car elle permet une analyse approfondie des circonstances entourant un acte supposé répréhensible, favorisant ainsi une justice plus équitable et nuancée.
      Si la distinction entre causalité et imputabilité est établie en droit, la notion d'imputabilité scientifique vient brouiller les cartes en s'apparentant pour partie à la causalité au sens juridique du terme.
    • Imputabilité scientifique. - L'imputabilité scientifique se réfère à la capacité d'attribuer de manière fiable et valable les résultats d'une expérience, d'une observation ou d'une étude à des causes scientifiques.
      Dans le contexte scientifique, l'imputabilité repose sur plusieurs piliers fondamentaux. Tout d'abord, elle exige la mise en place de protocoles expérimentaux rigoureux, permettant de contrôler autant que possible les variables qui pourraient influencer  les résultats. Cette démarche garantit que les observations faites ou les données recueillies sont directement liées à la manipulation ou à l'intervention spécifique étudiée.
      L'imputabilité scientifique implique également une méthodologie transparente et reproductible. Les chercheurs doivent décrire de manière détaillée leurs méthodes, de la collecte des données à l'analyse statistique, afin que d'autres scientifiques puissent reproduire l'expérience et vérifier les résultats. La reproductibilité renforce l'imputabilité en montrant que les conclusions ne dépendent pas d'une seule instance, mais peuvent être confirmées indépendamment par d'autres chercheurs.
      Enfin, l'utilisation de méthodes de statistiques appropriées est essentielle pour interpréter correctement les données et éviter des conclusions erronées. L'imputabilité scientifique nécessite une compréhension approfondie  des limites statistiques et une interprétation prudente des résultats.
    • Frictions entre vraisemblance et certitude. - Chacun comprendra alors les tensions entre une causalité juridique - qui peut admettre des présomptions ou des vraisemblances - et une imputabilité scientifique qui repose sur des certitudes ou la reproductibilité du phénomène constaté.
      C'est dans ce contexte qu'apparaît une augmentation des plaintes d'associations ou de patients en rapport avec des problèmes environnementaux et des effets sur la santé. La logique de l'expert en santé environnement et la logique des approches juridiques sont différentes et peuvent aboutir à des conclusions non concordantes. Il est important de comprendre les raisons de la non-concordance. il est important d'expliciter ces raisons de non-concordance au niveau des différentes instances qui vont être confrontées à ces problématiques.
  • dans le cadre des appels à projets thématiques de l'année 2024 et avec le soutien financier du département Droit et transformations sociales
  • 4531 €TTC
  • année 2024

Travaux réalisés

  • colloque, 18 octobre 2024

Mise à jour le 19/03/2024

Direction scientifique / CERFAPS

Laurent Bloch
professeur de droit privé

Université de Bordeaux - CERFAPS - 16 avenue Léon Duguit - CS 50057
bureau C1-114
F 33608 Pessac cedex

+33 (0)5 56 84 54 90
Contacter par courriel

Direction scientifique / centre Artémis

Patrick Brochard
professeur émérite praticien hospitalier

Centre Artémis - CH Pellegrin - CHU de Bordeaux - PQR
Place Amélie Raba Léon
F 33076 Bordeaux cedex

+33 (0)5 57 82 12 84
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Fleur Delva
médecin de santé publique praticien hospitalier

Centre Artémis - CH Pellegrin - CHU de Bordeaux - PQR
Place Amélie Raba Léon
F 33076 Bordeaux cedex

+33 (0)5 57 82 12 84
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